Ovide
Les métamorphoses d’Ovide, Livre I (Fable 8)
(v.416) Pour le reste des animaux aux diverses formes, la terre d'elle-même les enfanta, après qu'à la longue l'eau se fut échauffée jusqu'en ses profondeurs aux feux du soleil, que la boue et les marécages détrempés eurent fermenté sous l'action de la chaleur, et que les fécondes semences des êtres, nourries dans un sol vivifiant comme dans le sein d'une mère, eurent grandi en prenant forme peu à peu. Ainsi, lorsque le Nil aux sept bouches s'est retiré des champs imprégnés de ses eaux et a repris son cours dans son lit primitif, quand le limon qu'il vient de déposer a été chauffé par l'astre céleste, les agriculteurs découvrent en retournant la glèbe, des animaux en grand nombre, parmi lesquels ils en voient certains à peine au début de leur formation, saisis presque à l'heure de leur naissance, certains encore incomplets et dépourvus de leurs organes essentiels ; et, dans le même corps, souvent une moitié est vivante et l'autre moitié n'est qu'informe limon. Car, dès que l'humidité et la chaleur sont combinées, elles engendrent la vie, et toutes choses sortent de l'union de ces deux principes ; et, bien que le feu combatte l'eau, l'air enflammé, chargé d'humidité, crée tous les êtres, et l'heureuse combinaison d'éléments discordants favorise la génération. Donc, dès que la terre transformée en boue par le récent déluge se fut réchauffée sous l'action des rayons célestes et de la chaleur bienfaisante, elle donna naissance à d'innombrables espèces, et, pour une part, reproduisit les anciennes formes, pour une part, en créa de nouvelles, inconnues. Ah! certes, elle aurait préféré ne pas le faire, mais c'est alors qu'elle t'enfanta, toi aussi, ô prodigieux Python, qui étais pour les neuves populations, être rampant de forme inconnue, un objet de terreur, tant était grande la place que tu occupais sur la montagne. Ce monstre, le dieu qui porte l'arc, et qui jamais n'avait auparavant pour d'autres que les daims et les chevreuils prompts à la fuite usé de telles armes, l'accablant de mille traits, au point de vider presque son carquois, le tua ; à flots son venin coula par les noires blessures. Et, pour que le temps ne pût effacer la renommée de son exploit, le dieu institua des jeux sacrés, aux compétitions acclamées par la foule, appelés Pythiens, du nom du serpent mis à mort par lui. Là, quiconque des jeunes hommes avait, à la lutte, à la course, en char, remporté la victoire, recevait pour récompense une couronne en feuillage de chêne. Le laurier n'existait pas encore, et Phoebus ceignait ses tempes charmantes, à la longue chevelure, des dépouilles du premier arbre venu.